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Hôtel TAGAWA

A partir de 10 ans.

/// CRÉATION  ///

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Si tu veux commencer quelque chose, tu dois commencer quelque chose.


Tu dis que tu voudrais bien commencer quelque chose ...Mais quoi ?



Elle, elle écoute le silence. Toi, tu en as plein les oreilles.

Tu voudrais bien arrêter de faire le malin, mais tu ne sais pas comment.



Je me sens mou comme un légume, comme un légume sur le buffet.


Je ne veux pas me faire bouffer, tu sais.


Moi je suis bien ouais ouais. En tout cas mieux qu'elle !
Elle, elle n'a qu'à rester à sa place ! Elle derrière et moi devant !


Je crois en moi. Je sais ce que je vais faire : je vais chanter !

Avec
Miguel Camino

Karine Germaix

Régie

Martin Delval

Écriture

Isabelle Verlaine, Miguel Camino

Mise en scène

Isabelle Verlaine / Christophe Thellier

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La lignée des chanteurs


Je viens d'une famille de chanteur, de mère en fils en fils qui vient d'Asturies, Mieres, une région au nord-ouest de l'Espagne, entre la Galice et le pais basque. Là-bas, tu as des castes, liées au folklore, les cornemuseux, les danseurs et les chanteurs. La famille de mon père c'était des chanteurs. Mon arrière-grand-mère, la mère de  la mère de mon père,  avait une très belle voix. Elle avait un répertoire, des chants de la mine, du folklore au chanson latino-américaine des années 20. Elle chantait du chant à pleine voix.  J'ai appris plus tard qu'elle avait eu la possibilité de faire carrière dans la chanson, avec un contrat à la clef pour Cuba, elle a tapé dans l'œil d'un producteur mais son père à refuser qu'elle parte faire carrière.  Sa fille, Consuelo, a épousé mon grand-père, Juan-José, un andalous, un rigolo, un blagueur,  elle est devenue femme au foyer.
Ils ont immigré vers la Belgique vers les années 1950 avec leur trois enfants le plus jeune, mon père, Miguel. Dans son village natal, on l'appelait, "El nino cantador", (l'enfant qui chante).
On le mettait sur les tables et on lui disait : "Allez, chante !" Quand il est arrivé à Bruxelles, il avait 13 ans. il parait qu'il a chanté devant le roi Baudouin, une chanson d'Enrico Macias "enfant de tout pays". Il a formé un groupe de rock et puis il est devenu électricien.
Je me souviens de sa mère, elle chantait dans sa cuisine et son canari, dans sa cage lui répondait, ils avaient un langage commun, elle et l'oiseau. Elle chantait au milieu des odeurs de cannelle, de noix, d'anis, de pois chiches, de bouillon de poules, de safran, de pâte qui fermente. Elle chantait à la maison avec son canari et me suis dit que sa voix était en cage.  Le chant ça me fascinait et ça me fascine encore.


L'hôtel Tagawa


Plus tard, mon père a travaillé à l'hôtel Tagawa, avenue Louise à Bruxelles, un hôtel tenu par une famille japonaise. Miguel, mon père avait une double vie, le jour électricien, le soir chanteur au piano bar de l'hôtel. L'électricien, on le connaissait bien, il débarquait toujours avec un objet électrique particulier comme un des premiers téléphone portable, un truc intransportable, qui fonctionnait avec une batterie énorme, pas mobile du tout quoi.  Le chanteur qu'il était,  le soir; la nuit, quand j'étais petit, ça me fascinait, pareil que la grand-mère. C'était mystérieux. Mon père chantait le soir pour des femmes, mais je ne pouvais que fantasmer sur l'idée, il ne nous en parlait jamais. Je ne le voyais jamais en action devant son public. Pour nous, quand ma mère n'était pas là, dans la voiture par exemple, il nous chantait des trucs marrants, comme " Gaston y'a le téléphone qui son…". Il chantait souvent. Mais la chanson de charme le soir c'était son jardin secret. J'en entendais parler par d'autres membres de la famille, les oncles surtout, qui se moquaient de lui du fait qu'il chantait des chansons d'amour. Moi je l'imaginais, en héros, en Zorro, un justicier, Toutes ces images était nourries de ma relation avec lui, la façon dont il me peignait, la ligne sur le côté, trois litres d'eau de Cologne, (il habite Cologne maintenant c'est marrant), dans cette famille, ils adorent se peigner. Mon grand-père me disait  souvent : "Allez tiens je te donne 5 francs, et tu me peignes". Il adorait sentir le peigne gratter son cuir non chevelu. Sans doute comme son père le lui avait demandé, et comme lui l'avais demandé à mon père, et voilà le lien du peigne. Donc mon père à moi me peignait et trouvait un grand plaisir à me faire beau et à m'enrober de compliment et me  répéter souvent, en me coiffant, que j'étais beau et que j'allais avoir du succès avec les filles, que je verrais, que j'en aurais autant que lui, des bandes de filles qui me courraient derrière par douzaines …le rêve quoi. Ça, çà venait alimenter les rumeurs de mon père chanteur et ça balayait toutes les moqueries. Des moqueries qui tout compte fait venaient le plus souvent des hommes de la famille, sans aucun doute ils étaient jaloux de lui. Je me  à l'imaginais, accroché à son micro, une forme d'homme  qui se dandine, des  paillète dans les cheveux,, et comme un poisson dans l'eau, un poulpe de velours, il planait au-dessus de ma tête. Pendant les vacances scolaires, mon père, m'emmenait à l'hôtel et pendant ses journées de travail, il me cachait dans les caves, au milieu de chaudières, d'énormes tubes et de tableaux électriques, de bruit de souffleries, de compteur qui tiquent, qui tac, je m'y sentais bien. Ça me faisait les mêmes sensations que j'éprouvais dans mon lit, les dimanches matins, sous les couvertures, bercé par le bruit de l'aspirateur, et mon père qui en le passant, chantonnait. J'adorais cette sensation de bruit de soufflerie, et j'adore encore être bercé par ce son. On appelait mon père sur son beeper; il me laissait là donc, au milieu des machines et il  partait arranger ceci ou cela. Il apparaissait me racontait un truc puis disparaissait.  De nouveau, là je n'avais accès qu'au technicien électricien qu'il était. Parfois je jouais dans les couloirs de l'hôtel avec pour compagnon, un petit Ma radja qui avait l'air de passer sa vie dans les grandes suites et on se trimballait partout à la recherche de mon père.  Mon père avait toujours milles histoires à raconter sur telle ou telle célébrité qui était passée par l'hôtel, la célébrité ça l'a toujours attiré. C'était quelqu'un qui charme, qui aime faire  rêver, qui aime rêver. Un charmeur compteur baratineur. On sait jamais avec lui quel est la part de réalité et qu'elle est la part d'invention.

 

Un charmeur naturel qui t'embarque.
 

Le chanteur qu'il était pourtant restait caché. Mais parfois nous étions invités, ma sœur, ma mère et moi,  à certaines soirées à l'hôtel, et je découvrais alors le lieu, la nuit, le piano bar, le pianiste Angelo, un roumain,  la discothèque, et sa piste de danse, avec ses lumières de couleurs incrustées dans le sol, qu'il avait placées lui-même. Un bar en forme de cercle, des chaises hautes autour, à droite la discothèque, et une piste danse qui scintille de toutes les couleurs,  autour des alcôves de petits coins salons, cocoon. . J'essayais d'imaginer mon père en train de chanter mais même à ces soirées-là, il ne nous montrait pas son chanteur. Sans doute que pour lui à l'époque, son jardin secret devait rester secret même pour sa famille, même pour sa femme. Peut-être se disait-il que la famille ne le comprenait pas, sous cette forme-là, dans cette peau-là. La famille ne le prenait pas au sérieux alors que lui s'investissait corps et âme dans ce rôle de charmeur, il l'incarnait comme personne cette partie de lui-même.
Les quelques fois où j'étais à l'hôtel le soir, je devais avoir 11 ans, je sentais que je pouvais aussi être le héros de ces dames comme lui et pour épater la galerie et frimer devant  les cousins, j'allais séduire des femmes, 3 fois plus âgées que moi. Pour moi ce qui était important c'était de les charmer et qu'elle me dise oui. Je sentais naitre du courage en moi.  Je les invitais à danser, elles me remerciaient, me berçaient de compliment en me disant : "Tu ressembles à ton père. Tu es bien le fils de Miguel". Je reproduisais sans le chant, par l'invitation à la danse, par exemple, ce savoir-faire qu'avais mon père. Une facilité à charmer.  Ça marchait, j'ouvrais une porte, et puis les autres, les cousins, ceux qui n'avaient rien osé, allait se fracasser comme des vagues sur un roche de femme trop mûre pour eux.


Dolorès


Mon père rentrait tard depuis quelques temps et cela créait des conflits avec ma mère, Marisa, la fille de Maria-Dolorès, Lola. Mon autre grand-mère. Chanteur le soir, ne se lève pas le matin. Il n'arrivait plus à se lever pour nous conduire à l'école, ce qui nous valait d'innombrables retards, mais je n'osais jamais dire pourquoi à mes profs. Le chanteur de charme  ca créait des disputes avec son épouse, Marisa, coutière, très précieuse. Elle  a souffert  de la misère, des trous dans les chaussures. Très tôt elle a du travailler, et elle à cousu des milliers et des milliers de vestes aux étiquettes de marques inconnues Pour elle, devant les autres il fallait être impeccable. D’où des conflits avec mon père sur la tenue vestimentaire. Lui, tellement dans la détente absolue, il allait travailler dans un  beau costume et le salir.  Quand il s'habillait, ma mère lui disait souvent : "No vayas coomo un Cantinflas". Tu ressembles à Cantinflas, qui était un célèbre clown argentin. Pour lui la classe, ce n'était pas un costume sur mesure. c'était surtout la détente, chemise ouverte, la veste à carreaux et les pantalons lignés, les ourlets qui tombent mal sur les chaussures, ça pendouille, pleins de trucs dans les poches, pleins d'argent, prêt à le donner au premier venu, super généreux. Le tout toujours avec un air extrêmement décontracté, mais fort dépareillé. Mais il s'en foutait.  
Ma mère devenait folle avec lui. Ca la rendait malade si on mettait un truc non repassé, ou légèrement décousu, elle commençait à fumer des oreilles et ses yeux devenaient tous rouges.  D’où d'innombrables disputes ou j'imagine encore mon père et ma mère au milieu du salon se disputer et un tourbillon de fringues qui vole autour d'eux, mon père essaye de s'habiller, ma mère le déshabille.
Un matin, je m'apprête pour aller à l'école, je mets un t-shirt, il n'est pas repassé.
Ma mère m'a vu passer, elle s'est levé du mauvais pied, elle veut que je l'enlève le t-shirt, il n'est pas à son goût. Moi pourtant je le kiffe ce t-shirt, c'est même mon préféré. Elle prend ses ciseaux, elle vient derrière mon dos, moi je suis en train de me brosser les dents face au miroir. Elle me découpe le t-shirt du bas vers le haut. Je me retrouve avec des lambeaux de tissus sur les bras. Comme elle était couturière, facilement elle pouvait déchirer sur un coup de nerf un vêtement et puis recoudre et ainsi de suite.


L'Andalousie


Mes parents décident  avec la famille de mon oncle de partir vivre en Espagne. Je suis devenu adolescent, Mon père et son beau-frère son des flambeurs, ils fantasment sur une vie au soleil, ils veulent faire fortune en rentrant au pays. Ils choisissent une région ensoleillée, la Costa Del sol. Ils ouvrent un café : "Le café des artistes". Toute la famille s'y retrouve, ma mère, se tourne les pouces sans sa machine, elle est accoudée à une table et surveille mon père. Lui est dans son élément, il anime, les soirs, le karaoké, mon oncle à la caisse, et moi à la plonge. Ma sœur, en train de se faire courir les jupons, enfin plutôt les pantalons, par une bande d'andalous complétement sous le charme de son petit accent français et de sa façon de prononcer " chupito de melocoton con limon" (Petit schot de liqueur d'abricot avec citron). Derrière le bar, je suis à la plonge et je regarde mon père en chair et en os cette fois, faire ce qui autrefois me faisait rêver, faire ce qu'il a toujours rêvé lui, chanter l'amour. Ma mère à sa table, n'étais pas très heureuse de le voir chanter. Sans doute attendit -elle, comme jadis, que mon père lui chante en privé, une chanson d'amour, à elle seule, et qu'à elle seule,  
On veut attirer une clientèle adulte, qui consomme, alors on engage 'Taqui'. Taqui, c'est un type, laids, gros, gras, avec une voix très rauque, qui fume et bois, et c'est un professionnel, spécialiste en nénettes et en alcool, le barman routard. Il fait des cocktails incroyables et ne cesse de faire des compliments aux femmes qui défilent. Il s'est mis en tête de me former au métier de barman et donc aussi de charmer pour "follar" (baiser donc) A mes yeux il n'est que vulgarité, il est à l'opposé de mon père. À travers mes yeux d'adolescents, je vois d'un côté; l'homme qui  charme que je trouve sirupeux à l'époque et de l'autre l'anti-char me, la grossièreté visqueuse incarnée,  l''homme le plus laid du monde. Derrière le bar, je vois passer au café, toute ma classe, toutes les filles de mon école, qui, une à une, viennent me faire la bise, puis vont s'installer devant une boisson. Qui vont-elles avoir en face d'elles ? Mon père sur son estrade, avec son micro, ses disques lasers et son air décontracté, il se donne en spectacle. Autrement dit la honte. Mon père est passe d'être un héros, à être le type le plus ringard que je connaisse. J'en rougissais de honte et pourtant, les filles, et même l'élue de mon cœur, étaient charmées, malgré le fait qu'il chante des tubes ringards. Moi derrière le bar, je fais profil bas.  Après leur passages, je débarrasse les tables, et je cherche sur les petits papiers, qu'elles avaient remplis pour chanter au karaoké, une trace de quelque chose, un mot , une preuve d'amour … la chanson que moi, je n'aurais jamais osé leur chanter. À cette époque je ne chante jamais en présence de mon père, ni en présence de personne d'ailleurs. Timidement, loin de lui, je commence à me maquiller en Pierrot, et avec les copains, j'arrive à charmer, et à exprimer, mais sans la parole. Un pierrot fou était en train de naitre et il est devenu le clown que je suis. Loin du registre de mon père, mais avec la même sensibilité.


La femme fatale


Dans la bande de fille qui passait par le café, deux d'entre elles attirent mon attention.
Nuria, fille garçonne, pubis en avant, surnommée "La chocho gordo" (La grosse chatte), par tous les garçons qui s'étaient risqués de la séduire et qui par jalousie, sans doute, l'avaient étiqueté gouine. C'est vrai qu'elle marchait comme si elle mettait en avant un gros paquet entre les jambes, comme si elle nous montrait son sexe en disant prenez-le, alors qu'en fait elle disait tout le contraire, c’est-à-dire ne le toucher surtout pas. Son sexe n'était pour personne de réel je crois. Nuria quand tu allais vers elle; elle s'éloignait, quand tu t'en éloignais, le cœur brisé, elle se rapprochait. Un peu comme, si j'en crois les dires de ma famille, de la même façon que mes parents se sont rencontrés, sauf que mon père, est arrivé au bout de ma mère, après d'innombrables allées venues, épuisé, saoul, mal, mais elle fut vaincue, par tant de charme et de douceur.  Je n'ai pas eu la ténacité et assez d'obstination pour conquérir Nuria. Ses yeux étaient durs et cela me fascinait, je l'aimais et je la détestais, elle me terrifiait. Je venais de la rencontrer, elle était toujours en bande, la bande de filles qui passait par le bar, que les potes de Marbella surnommaient "Las pijhippies" (bourge/ hippies). Bref je suis dans un bar, elle s'approche, et genre la première chose qu'elle m'a dit c'est : " Toi tu marches comme une fille". Elle me laisse coi, j'ai un grand moment de solitude, un grand blanc et puis je me reprends persuadé tout à coup que c'est la femme de ma vie, qui a su voir ma féminité, je lui dis : " Ça te dit d'aller faire un tour à la plage ? " Après çà elle ne m'a plus parlé pendant des mois !  Je lui avais écrit une lettre, que je n'avais pas osé lui donner, je l'avais donc donné à son frère pour elle.  Je rentre dans un bar ou je sais que je vais la croiser, et elle était là, je longe les murs pour l'éviter, je ne la vois plus, je me dis ouf elle est partie. Elle, elle me suit, vient derrière moi me taper sur l'épaule, et d'un air très arrogant, presque fâchée, elle me dit : "Alors t'as donné un lettre à mon frère ?  Pourquoi tu dois passer par mon frère ?
Mais qu'est ce qui m'intéressait chez cette fille ? Je me le demande encore. Belle mais effrayante. Avec elle ça toujours été, oui, non, oui non, qui sait, peut-être. Je l'ai un peu oubliée, je me suis désintéressée d'elle, çà ça l'a attirée évidement, et moi je me suis vengé.


Peur d'aimer une premier amour


L'autre, le premier amour de ma vie, elle s'appelait Alicia. Alicia Mari Palomo. Comme Paloma,(colombe) mais Palomo. J'en étais vraiment amoureux. Très douce, cheveux châtains, franche, ronde, avec tout ce qu'il faut là où il faut.  On passait ensemble beaucoup de temps, je dormais chez elle, enchevêtrés tous les deux dans son sofa. Je lui ai écrit des poésies, je l'ai charmée, je l'ai séduite,  (tout en alimentant un amour pour Nuria). Dans une des poésies, j'étais une fourmi et je me promenais partout sur elle, sur son corps, je rentrais dans one oreille, je laisser glisser dans son cou, je m'aventurais entre ses seins. J'évitais les endroits trop poilus. Je ne me rendais même pas compte, naïf que j'étais, du double sens que le poème avait de pouvoir me glisser comme ça dans elle, et encore moins de l'effet dévastateur de mon charme de gros naïf. Je ne m'en rendais pas compte ou je ne voulais pas m'en rendre compte. Après c'était comme si je me retrouvais avec sur les bras un amour que je n'avais pas voulu, mais je me mentais à moi-même, j'avais juste peur d'aimer. Quand Alicia fût prête à être cueillie, je ne l'ai pas fait. Et elle m'a attendu pendant des années. Moi je m'inventais un autre amour possible avec une Nuria difficile à atteindre. Je préférais rêver à un amour impossible plutôt que de dire oui. J'ai continué longtemps ce petit jeu et cette petite chanson, non à celle qui me disait oui et oui à celle qui me disait non. Ca me permettait de ne pas prendre de risques. C'est là où j'aurais eu besoin d'un héros à la rescousse, mais mon père s'en allait, il nous quittait, il se séparait de ma mère. Car dans le fond j'aurais bien encore suivis ses conseils. Alicia s'était rapprochée, rapprochée, rapprochée, elle était devenue une énorme fleur aux pieds d'une toute  petite fourmi. Je ne pouvais plus la nier, et elle en pouvait plus de m'attendre. Mes amis me disaient mais pourquoi tu ne lui dis pas oui, imbécile.  Elle ne cessait de me dire oui, oui, oui. Un jour, des années après, on se voyait moins souvent, car elle partait étudier à Cadix, on s'est croisés, dès qu'on se revoyait elle reprenait espoir. On est allés boire des coups, et ses yeux disaient encore la même chose, et moi je me sentais encore comme le gosse qui invitait les filles plus âgées à l'hôtel et qui après savait pas quoi faire avec. Donc on va boire des coups Alicia et moi, on entre dans un café, et je me mets, inquiet, à chercher du regard quelqu'un. Qui ? Une Nuira, une chimère quoi. Alicia, me voit faire ça enfin elle a dû le sentir, elle a dû sentir que ne nouveau je tentais l'esquive alors elle me dit : "Mira Michelle , tu me quieres o no me quieres ? (Bon écoute Miguel, tu m'aimes ou tu m'aimes pas ? ) Et la comme un con je lui dis non. Elle s'est fait à cette idée, et moi je ne m'y suis pas encore fait. Enfin c'est un de mes plus gros regrets. 20 ans parés je suis partis vérifier, naïf, si elle m'attendait toujours, mais elle avait fait sa vie, et je n'y étais plus invité. Trop tard.

Miguel Camino
 

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